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15 mai 2005

Référendum et didactisme

Chaque jour nous rapproche d’un référendum qui donne des sueurs froides à une bonne partie de la classe politique française et même par-delà.
Les sondages en faveur du non ont cet aspect positif qu’ils posent l’attention sur ce vote et le débat qui l’entoure (quelque soit la qualité de celui-ci, c’est positif).
Il ne permet cependant pas à la classe politique majoritaire (l’essentiel de la gauche et de la droite démocratique) de convaincre son électorat à voter oui.
Pourquoi le politique peine-t-il tant à imposer ses idées dans l’opinion publique ?
Avant tout, il me paraît logique de s’intéresser plus particulièrement au camp du oui vu que la défense d’un non, même légitime, est plus facile à mettre en œuvre. Il peut en effet s’appuyer sur certaines peurs parfois très diverses (encore une fois justifiées ou non) dans l’opinion publique et les agréger dans un vote protestataire même sans unité de propos. Les partisans du oui doivent quant à eux davantage convaincre, tâche bien entendu plus difficile. Ils doivent faire face à ces craintes citoyennes dans une société insécurisée sur le plan social et dans son environnement proche.
Malgré la relative difficulté du texte (les projets de loi nationale sont-ils tous automatiquement simples ?), il me paraît tout de même réalisable d’exposer des arguments probants pour défendre ce traité constitutionnel.
Mon hypothèse pour expliquer l’échec actuel de l’entreprise s’inscrit dans une vision plus large du mode d’action de l’homme politique moyen. A savoir une incapacité à rendre compte de la complexité du débat.
Pendant longtemps, l’homme politique est apparu omnipotent, capable d’agir dans de nombreuses sphères de la vie publique et plus particulièrement en matière économique.
La mondialisation de l’économie a rendu l’idée du territoire national quelque peu caduque. Désormais, les entreprises délocalisent beaucoup plus facilement devant la concurrence de certains marchés émergents et le déplacement des centres décisionnels à l’étranger. D’un autre côté, l’ouverture des frontières offre des perspectives en matière d’exportations, lesquelles évoluent notamment au gré du marché des devises et du prix du pétrole. Autant d’exemples illustrant que l’environnement économique est devenu sensiblement plus complexe que le monde dans lequel nous vivions il y a 30 à 50 ans. Devant ces évolutions, l’homme politique paraît démuni pour assurer l’objectif affirmé du plein emploi. Il dispose certes toujours d’une certaine capacité d’action en agissant sur plusieurs moyens de politique économique. Une bonne politique de l’emploi peut donc favoriser le recul du chômage (et inversement). Cependant, il est évident que l’évolution du nombre de sans-emplois dépend aussi et surtout du contexte économique mondial.
L’homme politique a souvent nié cette évidence ces dernières années. Il a souvent cherché à simplifier aux yeux du public la complexité croissante du monde économique, de peur peut-être de perdre une partie de son électorat en avouant une certaine impuissance.
En prenant le parti de la simplification, il a rejeté tout effort didactique qui s’impose pour expliquer la réalité des choses et adopté plutôt un discours fédérateur autour de thématiques fortes censées répondre à une peur, maintenant ainsi son rôle prédominant aux yeux de l’opinion publique (thématique de la fracture sociale en 1995, de l’union de tous les français face à l’extrême droite en 2002, vite contredits par les politiques menées).
Aujourd’hui, l’homme politique est soudainement obligé de se battre sur un seul sujet : oui ou non à la constitution européenne. Un sujet complexe on le sait, surtout en raison des conditions de sa mise en oeuvre : une synthèse reprenant des sensibilités politiques et culturelles différentes.
Face à ce sujet, les partisans du oui ne parviennent pas à trouver l’argumentaire juste. Ils ne peuvent pas dans cette matière agiter de nouvelles thématiques, de nouveaux espoirs, simplifier la forme de façon à apporter une réponse définitive aux problèmes. Ils sont obligés de défendre une position qui inclut en son sein des éléments négatifs, inaboutis, insuffisants.
Au lieu de cerner les véritables enjeux stratégiques - et donc complexes - d’un oui (améliorer le mauvais traité de Nice, reconnaître les latitudes que le traité laisse pour envisager une Europe Sociale qui ne décide pas ici, insister sur la renégociation impossible d’un texte réalisé à 25 sans compter que les appelants au non ne parlent pas d’une seule voix), le politique continue à bassiner des simplismes auxquels n’échappe ni le non (la Turquie, la fin définitive de l’Europe Sociale), ni le oui. N’a-t-on pas entendu Jacques Chirac dire que le traité est tout sauf libéral ? Que le non serait un séisme presque apocalyptique (la peur version oui) ?
Par manque d’habitude du débat complexe, l’homme politique ne parvient pas à sortir de la guerre de propos simplistes pour faire pencher la balance dans le camp du oui.
Ces prises de position tendent à rendre le débat opaque et ainsi l’exposer à des points de vue, des thématiques qui le dépassent. Sont alors abordées des questions plus proches du débat de 2007 que de celui qui occupe. Peut-on parvenir à convaincre la population quand on admet ne pas en comprendre toute une frange qui incarne la société de demain (les jeunes)?
Le oui l’emportera peut-être mais le chemin pour y parvenir aura été révélateur de l’inconsistance du discours de bien trop de politiques actuels.

Ps : j’ai pris une cible évidente (J. Chirac) mais le PS français manque furieusement de clarté dans son discours lui aussi et ne s’en sortira sans doute qu’en adoptant un discours plus clair, didactique et cohérent.

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