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Mo's blog
25 septembre 2004

"La folle"

Un sujet sensible chez les gays. La folle gêne, fait peur et est souvent ostracisée. Je n'échappe pas à la règle : j'ai difficile à me faire à l'idée que je puisse avoir un ami « folle », alors que dire sexuellement (mais ça, cela fait partie d'un domaine où la raison n'a que peu de droits au chapitre).
Cela mérite quand même une réflexion sur le bien fondé de tels jugements et de jouer sur des nuances importantes.
Quelles sont les raisons de ce « non à la folle » ?.
1. La folle est hystérique : elle doit toujours en faire des tonnes pour parler de telle ou telle situation. Tout est toujours exagéré dans son expression. Elle est artificielle, toujours en représentation (est-ce devenu son seul visage ?) et le seul fait de l'entendre génère une réaction épidermique...
2. La folle est souvent bête : ses centres d'intérêt sont limités à des sujets souvent bateaux, peu intéressants : sa dernière rupture avec un mec dont elle était tellement amoureuse (elle l'avait rencontré il y a trois jours), Mylène ou Madonna
3. La folle gêne : elle rend un image du gay caricaturale et perpétue ce sentiment du gay « cage aux folles ».

Mais reconnaissons aussi les « oui à la folle » :
1. La folle a tendance à colorer la soirée, à nous faire rire (les gens sérieux nous emmerdent tellement)
2. La folle s'assume sans ambiguïté et revendique la part féminine du gay. Elle participe à la reconnaissance de la diversité des vies gay.
3. Elle a souvent été la première à défiler, manifester pour les droits des gays quand ce n'était pas encore autant reconnu.

Sur base de ces derniers points et donc du droit à la différence, je me dois de respecter la « folle ».
Ceci dit, respecter veut-il dire que je ne peux plus utiliser ce terme ? Ne pas fréquenter de folle signifie un manque d'ouverture ?
Je pense à ce niveau que répondre à la question, c'est poser celle de la relation amicale. Nous avons le choix de nos amis et celui-ci se réalise en fonction de différents critères, dont certains sont d'ailleurs inconscients : le flux qui passe ou non avec telle ou telle personne. Mais se constituer un cercle d'amis, c'est aussi se définir soi-même. Au travers de ces autres que l'on aura choisi, on projette au monde une image de soi. « Montre-moi tes amis, je te dirai qui tu es... ».
Qu'il n'y ait pas de « folle » dans mon entourage direct peut s'expliquer par des critères plus ou moins raisonnables.
Parmi les moins glorieux, y a-t-il sans doute une volonté de se dissocier des folles pour ne pas trop montrer au monde son côté gay (il est sans doute difficile de s'assumer à 100%) et aussi se protéger de railleries, voire d'une violence qui touche davantage les hommes plus effeminés.
Autre raison plus assumée et positive : je cherche à m'entourer de gens légers et sérieux à la fois, dont les goûts et choix de vie peuvent se rejoindre un minimum avec les miens. En la présence d'amis, nous élaborons une scène de vie qui correspond le plus possible à l'idéal que l'on a en tête : d'une certaine manière, comme disait Foucault, celui de faire de sa vie une oeuvre d'art. Les rencontres entre amis (encore plus quand on est en couple et qu'on est donc au minimum 3) donnent lieu à une certaine « représentation » (l'ambiance est en fait une construction commune tacitement acceptée) dans laquelle tout le monde joue un certain rôle (que certains parviennent à remplir et d'autres pas, ce qui est inévitable au sein d'un groupe). Il ne s'agit pas de repousser le naturel de son caractère (nous restons le résultat d'une construction sociale), de nier la diversité des êtres ou de se fermer à l'inconnu (bien au contraire) mais il faut trouver dans l'autre cette flamme incandescente qui donne l'impression que l'autre va aider à l'élaboration d'une vie conforme à son idéal. La «folle» dans la définition négative ci-dessus n'a pas sa place dans ma vision idéale, au contraire du côté « camp » que l'on peut retrouver chez tout le monde (qui d'ailleurs peut dire qu'il n'a jamais d'attitude effeminée ?).
Pour ceux totalement hostiles aux folles, une petite maxime : « il y a plus folle que les folles : les femmes» (à elles, on leur pardonnerait tous leurs « excès » de féminité et critiquerait même leur masculinité). Bref on en vient à la question du « genre » : si on veut admettre qu'une fille ou un garçon n'agit pas en fonction de son sexe mais en fonction de sa sensibilité masculine ou féminine (et je revendique cela), j'accepte la folle - même si je ne partage pas du temps avec elle. Car finalement, je ne passe pas plus de temps avec un beauf (que je n'hésiterai pas à définir comme tel) et ce n'est pas pour autant qu'il est privé de droits et de respect.

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