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Mo's blog
1 octobre 2004

"Un monde parfait" (une vie antérieure part 1)

« On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille ». Naître sous une bonne étoile ou vivre en Occident, dans une famille unie, prendre les traits d’une jolie petite tête blonde, dotée d'un certain don pour les études (genre premier de classe) et le sport. Certes aussi mauvais perdant mais personne n'est parfait. Une aubaine pareille, on ne s’en plaint pas et pourtant…

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Studieux. Comment pouvait-il en être autrement avec des parents enseignants ?  Un environnement favorable à une réussite scolaire que je m’ingéniais à traduire en perfection.
Les professeurs formulaient à mon encontre un seul reproche: une incapacité à tenir en place. Une nervosité que je tentais de canaliser en pratiquant du basket, un virus transmis très tôt par mon père. Je lui consacrais la plupart de mes temps libres. A l’entraînement ou le plus souvent seul, dans la cour de notre maison. Je m‘amusais à rejouer des matches, m’attribuant tous les rôles de l’une ou l’autre équipe.

Malgré un déficit en  taille comparé à mes camarades (j’étais désespérément le plus petit de mon équipe), je me distinguais par ma technique de balle et ma rapidité ainsi qu'une certaine maturité pour mon âge. Le sport, quand on le pratique avec réussite, constitue une source de fierté et surtout de confiance en soi. Un élément non négligeable pour moi, l’éternel timide. Quand je me produisais sur un terrain, je ressemblais à ce comédien discret qui se lâche sur scène. Je demeurais, en dehors, régulièrement en position de retrait, souvent mal à l'aise dans le contact humain. J'acquis ainsi assez tôt un rôle d'observateur de la vie, laissant celui d'acteur à mes coéquipiers. Je les considérais parfois comme un peu « gamins » mais dans le même temps, leur côté cool, leur facilité à déconner en public, à ignorer la moquerie, à ne pas redouter le regard de l'autre me fascinaient.

Nous formions, avec quelques copains de classe, une solide équipe, remportant régulièrement les titres de champion provincial dans notre catégorie. Quelques fois par an, nous livrions quelques parties épiques face aux adversaires les plus redoutables, avec son lot d’angoisse d’avant-match et de tension nerveuse durant la rencontre.  Cette dose d’adrénaline qui, une fois injectée dans votre sang, se transforme en un goût dont la recherche vous poursuit toute la vie durant.   

Le basket me procura des joies réelles, même si rarement extériorisées. Lors de ma douzième année, j’atteins le point culminant de ma « carrière sportive » en décrochant une place au sein de l’équipe nationale de ma catégorie (titre un peu trompeur car elle regroupait des joueurs de 6 des 10 provinces belges). J'en fus même désigné capitaine, un rôle confié sans doute en raison de mon côté sage. Cette sélection me permit de voyager notamment en France et en Suisse, dans le cadre de tournois internationaux.

Parmi les 10 sélectionnés, nous étions seulement deux issus de la même province. Je rencontrais souvent Michaël comme adversaire lors de matchs décisifs de notre compétition. Notre place quasi identique sur le terrain nous obligeait souvent à des duels directs. Nous nous respections en tant que leader de notre équipe respective, sans être amis pour autant.

Notre confrontation initiale remontait à notre première année en compétition. Nous avions alors 6 ans. Nos équipes respectives avaient remporté toutes leurs rencontres et nous les accueillions pour le match au sommet. Lorsque j’entrai ce jour-là dans le hall omnisport, 30 minutes avant le début de la rencontre, l’échauffement de nos adversaires du jour avait déjà débuté. Cette mise en forme précoce dévoilait clairement leurs intentions. Avant de rejoindre notre banc, j’observai avec minutie les forces en présence. Sur base de leur course, de leur dribble, je pouvais rapidement cerner quels joueurs constitueraient un danger pour notre équipe. Mon père, qui était aussi notre entraîneur, me confirma assez vite leur principal atout : un petit blond (certes plus grand que moi) au joli minois. Une démarche et une attitude de petite star en herbe, un caractère manifestement extraverti que j’allais admirer lors des années qui suivirent. Je me focalisai sur Michaël pendant un certain temps, tâchant de jauger son niveau. Lorsque, soudain, je croisai son regard. Un trouble singulier m’envahit, un émoi dont l’écho resta gravé dans ma mémoire, sans doute à jamais.

Une expérience du même genre se produisit quelques années plus tard lors d'un stage organisé durant les vacances scolaires. Dès le premier jour, j'avais remarqué les qualités affichées par un des participants. Un excellent joueur au visage fin et harmonieux duquel ressortait un grain de beauté à la commissure des lèvres. Cette caractéristique physique exerçait sur moi une attraction étrange. Il est probable que durant les premiers jours, en renard à l'affût de sa proie (le prix du meilleur joueur du tournoi), nous nous épiâmes mutuellement dans la plus grande discrétion. Jusqu’au quatrième jour au cours duquel, pour je ne sais quelle raison, Régis se mit soudain à pleurer. Profitant de cette occasion, je posai cette fois sans gêne mon regard dans sa direction. Quand il m'aperçut au bout de quelques secondes, il se produisit un curieux événement : Régis cessa instantanément de pleurer. Je demeurai interloqué par cette réaction. Sans en comprendre consciemment la portée, ce moment resta gravé en moi. Au-delà de l'émoi provoqué par sa propre personne, j'avais sans doute perçu comme un échange: en le détournant de sa douleur, mon regard l'avait clairement troublé.

Depuis, il m’est arrivé d’interpréter ce trouble (il ne s'agissait de rien de plus à ce moment-là) comme un premier signe de désir envers les garçons. Et de me demander si la tension potentielle entre cet émoi et la « norme » qui ne l'accepte pas n'a pas traversé mon adolescence de manière sous-jacente, influençant au passage mon caractère, ma personnalité…

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