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Mo's blog
14 juin 2006

Sexy or not

Touchés ces dernières années par la vague de télé-réalité, nous ne pouvons pas rester totalement insensibles au phénomène qui a envahi nos écrans sous une forme ou une autre, souvent pour le pire mais pas exclusivement. Récemment le sérieux Inrocks confiait son admiration pour la Nouvelle Star, forme accomplie de programme télévisuel, qui renonce au côté voyeur (on ne suit pas les candidats durant la semaine) tout en permettant au spectateur de partager le stress des participants lors du direct et de suivre leurs évolutions au fil des émissions. 

Je me tourne plus volontiers vers le plus amateur et intriguant "Sexy or not" (émission dont la diffusion vient seulement de se terminer en Belgique). Un casting copié sur la Nouvelle Star avec une différence essentielle: on ne chante pas mais on tente d'apparaître sexy.
Le motif est bien entendu un peu incongru (moyen facile d'offrir quelques morceaux de chair à l'écran) mais le programme réserve quelques moments délicieux tout en suscitant l’une ou l’autre source de réflexion.
 

En constituant un jury, l'émission tente ainsi d'instituer une forme d'objectivité à la définition du terme "sexy". Ce raisonnement paraît en soi impossible: si l'on considère sexy "ce qui incite au désir sexuel", chacun de nous, en fonction de son histoire, de ses désirs enfouis au plus profond de son inconscient, interprétera différemment cette notion et jettera dès lors son dévolu sur une personne incarnant le mieux cette image idéale. Cette volonté de dessiner les contours du sexy avec "des spécialistes" se révèle autant fascinante par sa prétention que révélatrice de nos sociétés. On peut ainsi associer les choix du jury aux goûts de notre époque: il s'agit tout d'abord d'être mince, bien fait(e) avec un joli visage (autrement dit, il faut déjà être beau). Vos chances augmentent quand vous ressemblez à ce qui se fait de mieux dans le show-biz jeune et à paillettes: stars de RnB ou bouts de femmes énergiques et provocantes (de Britney à Pink en passant à Gwen Stefany).
Les stéréotypes ancestraux s'imposent cependant également en parallèle: une féminité obligatoirement associée pour les filles et une virilité indiscutable pour les garçons (un mec carré, aux muscles affirmés - mais pas trop - et aux traits faciaux masculins).

Par delà cette plastique demeure central le savoir-faire de l'attitude sexy. Que mettre en valeur pour parvenir à correctement répondre à l'objectif de cette compétition? Avec une réponse qui varie sensiblement selon le sexe du candidat. 

On constate ainsi chez les femmes que la pose sexy vire souvent vers l'érotique soft de fin de soirée. Comme si l'idéal se tournait rapidement vers un copiage du (mauvais) porno sous l'effet croissant de cette représentation dans nos sociétés contemporaines. Certaines concurrentes parviennent à reproduire avec un certaine réussite les stéréotypes en la matière alors que pour d'autres la posture et l'expression ne peuvent susciter que rires ou considérations pathétiques. 

Pour les hommes, la méthode est moins clairement définie vu l'absence de référents évidents. L'imaginaire de nos sociétés (alimenté par les films, les pubs, les clips,...) tend à scénariser la séduction: c'est avant tout la fille qui, par son regard intense, ses poses suggestives, doit aguicher le mec qui va ensuite tenter de répondre à l'invitation et prendre sa place de mâle dans la relation.
Dans le concours, le mec se voit obligé d’assurer d’entrée ce rôle plus provocateur. Beaucoup n'imaginent même pas cette éventualité. Pour eux, mettre un T-Shirt et un jeans "in" suffit à se rendre sexy. Ils arrivent devant le jury en se contentant d'apparaître comme tels avant de se figer, un peu perdus, comme si soudain ils se rendaient compte de leur mauvaise compréhension du thème. Ils improvisent alors une attitude, entre le grotesque et l'hilarant. Le défi du casting s'avère soudain bien cruel pour eux. Pour être sexy, il faut avoir confiance en soi, s’affirmer et par dessus tout être séducteur. Après une remarque négative du jury, certains perdent soudainement et totalement de leur superbe . La dimension intimement personnelle du concours (je suis ce que je parais) semble atteindre plus directement le candidat. Il accuse le choc comme si on lui signifiait après qu’il se soit mis à bander qu'il n'est pas bien monté. Rétractation assurée.
 

C'est dans ces moments de grande solitude, de perte absolue du contrôle viril que l'on s'identifie aux participants. Avides de reconnaissance et au fonds tellement peu sûrs d'eux pour la plupart, leur fragilité révèle soudain bien plus qu'un bout de peau dévoilé. Ce casting devient alors le miroir du rêve des jeunes générations à trouver leur place dans le marché des relations glamour. Et comme dans la vraie vie, les perdants se ramassent à la pelle.

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Commentaires
M
En fait, ce sont certains journalistes du magazine (pas les plus anciens) qui ont exprimé cet avis positif. <br /> Au delà du style musical qui ne me correspond guère, il faut reconnaître (pour en avoir vu quelques bribes) que cette émission avait quelque chose cette saison (diversité des candidats non formatés).<br /> Ma foi, être IN c'est aussi aimer ce genre d'émission sans doute ;-)
B
Cher Mo',<br /> <br /> Si ce que tu écris es fondé, cela confirme bien une tendance qui se dégageait depuis maintenant quelques années. NON, les 'Inrocks' n'ont plus rien de Rock'n'roll et oui, comme les autres magazines, cet hebdo a succombé aux douces sirènes de cette foutu société de consommation. Les Inrocks encenser la nouvelle star, c'est comme imaginer le pape faire de la pub' pour 'DUREX'...Un brin, euh, décalé.
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