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26 janvier 2006

"Et Dieu créa la femme" (une vie antérieure Part 8)

viavant8

Dans la dernière ligne droite avant les études supérieures, le choix des options scolaires tend à s'affiner. La tradition élitiste locale préconisant l'orientation "mathématiques fortes", je suivis le mouvement, avec d'autant plus d'aisance que nous nous accordions plutôt bien les chiffres et moi.
Pour cette rentrée, je pris la résolution de me remettre en selle après une année en dilettante durant laquelle, anesthésié par le confort du retour à la maison j’avais accumulé un retard conséquent dans de trop nombreuses matières. Il est probable que le brave Ernest, voisin lointain à l’ouïe défaillante, ait perçu l’énorme soupir de soulagement poussé, un soir de début juin, à l'annonce de l’annulation des examens de fin d'année, grève des enseignants oblige. J'avais été quitte pour un avertissement et j’en tirais prudemment les conclusions.

Sophie (voir l’épisode 6) entretenait pour sa part une relation plutôt difficile avec les maths et son âme plus littéraire la conduisit logiquement à privilégier cette option.. A peine croisés, nos chemins commençaient déjà à se séparer. Ne fréquentant plus les mêmes cours, nos contacts s'espacèrent naturellement. Cet épisode ne devait toutefois pas être rangé dans la case "souvenirs d'école". Sophie m’avait permis de découvrir l’amitié et je ne pouvais assimiler notre relation à une rencontre fugace oubliée l'année suivante. Ce que j’avais partagé avec elle, je ne parvenais pas à le vivre avec les autres. Mes sentiments demeuraient intacts et elle semblait également soucieuse de donner une suite à nos contacts passés.

L’intégration au sein de ma nouvelle classe se déroula sans anicroche. Je réalisai rapidement que la fin de récréation avait effectivement sonné. Les ambitions flottaient allègrement dans les esprits déterminés de mes camarades de classe. Leur sérieux s’accompagnait cependant d’une dose certaine de bonne humeur qui, par chance, était affichée par de fort jolis minois.

Au fil des jours, j'appris à connaître l’un de ces propriétaires. J'avouais déjà un faible pour les caractères bien trempés et dans ce domaine, j'étais bien servi avec Anne qui manifestait un puissant désir de réussite. Quelque peu rigide au premier abord, elle parvenait à s’ouvrir davantage une fois les premiers liens créés. De ses grands yeux bleus se dégageait alors un regard vif dont l’intensité traduisait la considération qu’elle portait à son interlocuteur.
La révélation de mon attirance ne survint que quelque mois plus tard, au moment où Anne se mit à sortir avec un autre garçon de la classe. Je les voyais se bécoter ici et là dans les couloirs, dans les locaux avant les cours. Subitement, je devins envieux de ce garçon et je désirai cette fille, sous l'emprise d'une attraction irrésistible pour ce flirt parfait, jusqu'alors seulement identifié à la télévision.

Cet éveil à la gente féminine aurait pu servir de déclic pour initier une aventure identique mais je ne pouvais m’affranchir de mes doutes, de ma timidité maladive, de ma crainte irraisonnée de la réaction d’autrui (« et si je m’avérais gauche dans la démarche ? »). A ma décharge, pas mal de filles avaient déjà opéré leur propre choix tandis que les autres, célibataires, ne me plaisaient pas. En fin d’année, je commençai toutefois à apprécier les discussions avec la charmante Laurence, silhouette élancée, peau pâle et longs cheveux noirs.

A vrai dire, la femme qui m’impressionna le plus à cette époque était sans nul doute notre professeur de français. Excellente enseignante appréciée de tous les élèves, elle dégageait un charisme fou dès qu’elle prenait la parole de sa voix grave, souvent prompte à asséner quelques vérités bien senties.  La quarantaine sexy, bronzée, en (mini-)jupe la plupart de l’année, cette femme de pouvoir exerçait une réelle fascination sur nous, étudiants studieux d’une ville de province bourgeoise. Elle incarnait un autre monde, une liberté de pensée et d’agir. A titre d’illustration, elle continuait à se rendre en boîte de nuit et je ne fus pas particulièrement surpris de la voir danser sur un podium lors d’une soirée de fin d‘année - même si cela nous paraissait « anormal », en comparaison de la vie plus rangée de nos parents.

Je ne pouvais me départir de voir en elle une bombe sexuelle quand bien même l’acte avec ce genre de femme ne m’effleura jamais l’esprit. Son aura contribua cependant hautement à la tendresse que j'éprouve pour les femmes qui osent braver la misogynie ambiante pour affirmer qu’elles sont libres et sans tabou sur le sexe (bien qu’elle-même n’en fit jamais étalage).

Un jour, lors d'une de ses digressions que nous appréciions tant,, elle nous expliqua qu’elle aimait beaucoup Lambert Wilson, ajoutant ensuite, désolée, qu’il était « pédé comme un phoque », ce qui s'avérait souvent le cas des beaux mecs. Si cette remarque pouvait sonner comme de l’homophobie, je ne l’ai jamais envisagé sous cet angle. Elle incarnait trop à mes yeux LA liberté, ce "concept-de-vie" que je n’ai retrouvé plus tard qu’au sein du milieu gay.

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Commentaires
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Tombé par hasard sur ton site, je me retrouve absorbé par ton écriture très personnelle et touchante...Je me retrouve dans certaines phrases, anecdotes et clin d'oeil sur les maux de l'adolescence et sur la difficulté de nouer des liens forts souvent par peur et parfois par lâcheté. Je ne suis pas gay, d'ailleurs j'ai une copine formidable, mais j'aime cette sensibilité que l'on trouve chez de nombreux gays...Sincèrement, tes écrits sont magnifiques, intemporels, sincères...
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