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10 décembre 2004

"Daniel" (une vie antérieure Part 4)

viavant4

Rétrospectivement, je pense que je devais représenter à cette époque une proie idéale pour un pédophile malveillant. Le manque affectif permanent que je ressentais malgré l'attention portée par mes parents (surtout par ma mère plus proche naturellement que mon père), ma sensibilité à fleur de peau transformaient tout contact avec autrui en source potentielle de chaos affectif. Pour m'adresser une remarque sans me blesser, il fallait veiller à y mettre toutes les pincettes d'usage. Certaines personnes y parvenaient mieux que d'autres et percevaient les dégâts qu'un commentaire ou une remarque négative pouvait causer en moi. Elles m'inspiraient alors un sentiment de sécurité. C'était notamment le cas d'un de mes profs qui témoignait souvent de bienveillance à mon égard. Un soir, il nous a raccompagné dans le bungalow. Il semblait ami avec l'éducateur. Il n'y avait que deux à trois élèves à qui il donnait cours parmi nous. Une fois le moment venu de rejoindre nos chambres, il m'accompagna jusqu'à la mienne. J'ai éprouvé un certain malaise, comme s'il violait mon intimité. Même s'il ne s'est rien passé, son regard particulier ce jour-là m'a perturbé. Il s'agissait peut-être simplement d'un regard qu'un père poserait à son fils mais je ne pouvais m'empêcher de rapprocher ces yeux de ceux d'un des assistants de l'équipe nationale de basket deux ans plus tôt.
Daniel était petit, gros, laid, assez gauche et timide. Il se montrait très gentil et prévenant envers nous. Il nous avait pris, Michaël et moi, plus spécialement sous sa coupe. Un jour, la veille d'une compétition, Michaël est allé dormir chez lui. Au cours de la nuit, il a senti un souffle, une présence, quelqu'un qui l'effleurait. Il a allumé la lumière. Daniel se trouvait au pied de son lit. Les choses en sont finalement restées là. Mes parents m'ont raconté cette histoire, sans s'indigner outre mesure vu que rien ne s'était passé. Nous étions encore loin de la frénésie anti-pédophilique récente. Lorsque j'ai appris, quelques années plus tard, le décès de Daniel d'une attaque cardiaque, je n'ai pu m'empêcher de pleurer. J'ai repensé à ce petit homme que la nature n'avait pas gâté mais qui avait de l'amour et de l'affection à donner, sans obtenir en échange ce qu'il désirait ou méritait. S'il avait choisi une voie maladroite de l'exprimer, il est toujours resté à mes yeux ce petit homme fragile, d'une gentillesse hors norme dont je n'ai jamais eu à me plaindre

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